Dans de nombreuses traditions orales, le ciel est perçu comme une voûte solide, infinie, faite d’une matière mystérieuse. Sa couleur bleue est associée au temps lui-même : on disait autrefois que le ciel, c’est le « temps », la temporalité dans sa forme visible.

Un phénomène météorologique particulier retient l’attention des paysans : quand une éclaircie perce un épais manteau nuageux, dévoilant un fragment de ciel bleu, on dit que l’on aperçoit le « vieux ciel ». Une expression poétique, comme une brèche dans la modernité, qui laisse entrevoir un monde antérieur.

Sur le littoral du Finistère, on croit que le ciel abrite de véritables paysages : montagnes, vallées, prairies, forêts… En breton, le mot glaz désigne à la fois le vert des prairies et le bleu du ciel — comme s’ils n’étaient que deux faces d’un même monde suspendu.

En Haute-Bretagne, certains affirment que le ciel bleu contient un liquide invisible, maintenu en suspension par la pression atmosphérique. Les étoiles y flotteraient comme des bateaux, sur cette mer céleste dont l’équilibre ne tient qu’à un souffle. Une vision cosmique empreinte de poésie et d’émerveillement.

En Vendée, les anciens racontaient que des oiseaux légendaires connaissaient la route vers cette mer supérieure. Transmise de père en fils, cette croyance évoque une époque où les frontières entre ciel et terre semblaient poreuses, accessibles à certaines créatures initiées.

Enfin, les marins du Tréguier affirmaient que la mer baignait autrefois le firmament. Ce contact originel aurait cessé après la Création biblique, laissant le ciel s’élever, déserté par les eaux. Une cosmologie locale puissante, où la séparation des éléments reste gravée dans les mémoires collectives.

Dans l’imaginaire populaire, les nuages ne sont pas de simples condensations de vapeur d’eau, mais des entités mystérieuses, riches en symboles et en fonctions magiques. De la Bretagne à la Manche, en passant par les écrits médiévaux, ils sont décrits comme des îles aériennes, des royaumes invisibles, ou encore des supports de navigation céleste. Voici un tour d’horizon des traditions et récits qui élèvent les nuages bien au-delà de la météo.

Contrairement à l’idée moderne de nuages comme brouillard diffus, les traditions rurales les décrivent comme des agglomérations d’éléments indéfinis, solides ou presque, capables de porter des êtres et des objets. Ils forment des îles aériennes dans lesquelles résident des génies, des magiciens, ou parfois même des princesses en captivité. Ces entités s’y cachent, s’y déplacent ou les utilisent pour accomplir leurs maléfices.

La croyance la plus célèbre associée aux nuages vient du Traité de Grandine, rédigé au IXe siècle par Agobard, archevêque de Lyon. Il y dénonce les superstitions de son temps, mais retranscrit avec précision la croyance selon laquelle des navires volants surgissent des nuées, notamment en période d’orage. Ces bateaux viendraient récolter le grain détruit par la grêle pour l’emmener dans un pays lointain : la contrée fabuleuse de Magonia.

Cette étrange idée trouve un écho dans le récit de Gervais de Tilbury (1152–1223), clerc et chevalier anglais. Dans son œuvre, il raconte qu’une ancre tomba un jour du ciel en Angleterre, sa chaîne disparaissant dans les nuées sombres. Le ciel, là encore, est envisagé comme un espace navigable, un univers parallèle suspendu.

Un conte marin de la Manche évoque un capitaine assiégé par des pirates. Par une prière magique, il fait apparaître une corde tombée d’un nuage habité par un génie. Les marins attachent la corde à la grande hune et le navire s’élève dans les airs, tiré par le nuage jusqu’à un port sûr. Le vaisseau est ensuite déposé en douceur, « sans secousse », à proximité des quais.

Les marins évoquent aussi des châteaux merveilleux suspendus dans les nuages, retenus par des chaînes d’or, entre ciel et terre. Ces demeures célestes, habitées par des princesses prisonnières, apparaissent comme un mélange de mirage, de rêve et de légende arthurienne.

Dans une version semblable, des diablotins embarqués à bord d’un navire déploient une échelle enchantée jusqu’à un nuage. Là, ils installent une poulie, passent un câble, et soulèvent le navire pour l’éloigner de ses ennemis. Une scène qui mêle ingénierie surnaturelle et tactique aérienne.

Dans l’ensemble de ces traditions, le ciel est conçu comme une gigantesque cloche inversée, dont la base frôle la Terre, tandis que le sommet s’élève jusqu’au firmament. Il devient alors le théâtre d’interactions fantastiques, où les lois de la gravité sont suspendues, et où les cieux prennent des allures de royaumes féeriques.

Dans les traditions populaires européennes, le ciel n’est pas seulement un décor céleste : il est une porte vers l’au-delà, un espace spirituel structuré, peuplé de symboles puissants et de figures célestes. Au-delà du bleu limpide de la voûte céleste, se cache le Paradis, là où résident la Trinité, les anges, et les âmes élues.

Selon ces croyances, pour atteindre le Paradis, les âmes doivent traverser trois couches de nuages :

  • les nuages noirs (souvent associés au doute ou à l’épreuve),
  • les nuages gris (zone de transition),
  • les nuages blancs (l’entrée vers le divin).

Cette structure symbolique évoque une élévation spirituelle progressive, marquant le passage de l’ombre à la lumière.

Le royaume céleste n’est pas coupé du monde des vivants. Il existerait des points de vue, des « fenêtres », depuis lesquels les élus peuvent observer les vivants. Charles Deulin, dans Les Contes du roi Cambrinus, décrit ces ouvertures entre les nuées comme des « judas », semblables à ceux des anciennes portes. De là-haut, Dieu, assis sur son trône d’or, observe les hommes.

Dans Le Chemin le plus court d’Alphonse Karr, un romancier influencé par les récits marins d’Étretat, les points bleus visibles par temps orageux seraient justement ces fenêtres où montent les prières des fidèles, et à travers lesquelles Dieu guette la Terre. En Franche-Comté et en Normandie, on dit que l’éclair, en déchirant la nue, laisse entrevoir un fragment du Paradis, comme si une brèche dans la voûte céleste offrait un accès furtif à l’autre monde.

Dans plusieurs régions – notamment le Val de Saire, la Basse-Normandie ou l’Ille-et-Vilaine – la cosmologie populaire place le Paradis, le Purgatoire et même l’Enfer dans les hauteurs célestes. Le ciel devient alors un espace complet, un lieu de centralisation des post-mondes.

Mais le ciel n’est pas exclusivement divin. Certaines légendes affirment que le Diable lui-même y rôde, capturant les âmes des criminels pour les emmener dans un Enfer suspendu. Il les saisit par les cheveux, dit-on, les arrachant au monde des vivants pour les jeter dans les flammes célestes. Une légende paysanne évoque un fermier ayant voulu obtenir un reçu de son seigneur décédé : il posa son pied sur celui du Diable, et fut transporté dans les hauteurs. Là, dans une salle infernale, le démon lui montra, par une porte entrouverte, son seigneur en train de brûler dans les flammes éternelles.

Les nuages ne sont pas de simples formations de vapeur dans le ciel. Dans les traditions populaires, ils sont parfois perçus comme des entités mystérieuses, capables de cacher des personnages surnaturels ou de révéler des messages du ciel. Leur forme ou leur teinte fait souvent l’objet d’interprétations ancestrales transmises de génération en génération.

Dans la partie française des Côtes-du-Nord, un phénomène céleste est connu sous le nom de « Chemin de Saint-Jacques ». Ce sont de mystérieuses taches rouges que l’on peut parfois voir dans le ciel, dont l’origine est liée à une légende ancienne.

Autrefois, une femme fortunée demanda à ses trois fils d’effectuer un pèlerinage à Saint-Jacques de Compostelle après sa mort. Les deux frères aînés, jaloux de leur cadet favorisé dans le testament, le poignardèrent, lui attachèrent une pierre au cou et le jetèrent dans une rivière. Mais lorsqu’ils arrivèrent au sanctuaire, ils découvrirent avec stupeur leur frère agenouillé devant l’autel, ses plaies encore saignantes.

Après leur pardon obtenu, le frère disparut mystérieusement. Les deux meurtriers, bouleversés, trempèrent leurs doigts dans le sang resté sur l’autel. En secouant la main, le sang s’éleva dans le ciel, formant des taches rouges visibles au-dessus de la Bretagne. Ces marques célestes réapparaissent, dit-on, chaque fois qu’un crime odieux est commis quelque part dans le monde.

En Wallonie, les nuages incandescents sont associés aux préparatifs de Saint Nicolas, le saint patron des enfants. À Pépinster, on dit en wallon :

« S’è sin Nikolè ki kù »
(« C’est saint Nicolas qui cuit »).

À Liège, on raconte que le saint met le feu à son four pour y enfourner les pâtisseries destinées aux enfants le jour de sa fête. À Seraing, il cuit pour eux de grands bonshommes de pâte. Ainsi, les teintes rouges des nuages du soir sont vues comme un heureux présage annonçant la venue des douceurs.

Sur la Manche, les marins observent un phénomène céleste bien particulier. Lorsqu’un nuage blanc, flanqué de deux nuages plus sombres ressemblant à de petits talus, apparaît à l’horizon, ils le nomment aussi le Chemin de Saint-Jacques.

Selon la croyance, c’est par ce chemin qu’aurait monté au ciel le saint pèlerin. Ce signe porte chance à ceux qui prennent la mer, comme le dit le dicton :

« Le chemin d’Saint-Jacques porte bonheur
À tous les navigateurs. »

Les marins guettent ce signe avec espoir, car il est vu comme un présage de mer clémente et de traversée sans encombres.

À Fourmies dans le Nord, les enfants appellent les petits nuages floconneux des « anges », sans qu’on en connaisse la véritable origine. Une croyance similaire existe dans l’Albret, où un petit nuage blanc aperçu devant le soleil est surnommé « l’ange de Videau-des-Bourns ». Selon la légende, cet ange chercherait un avare cruel disparu dans une fondrière.

Dans de nombreuses régions, les formations nuageuses sont comparées à des arbres. En Hesbaye, on parle de l’Arbre d’Abraham ; en Condroz, de l’Arbre Saint Barnabé : un éventail de nuages aux bords flous. Quand cet arbre semble « avoir les pieds dans l’eau » (orienté vers un cours d’eau), la pluie est annoncée. Le pays de Blois connaît l’Abrecâbre, un bouquet de nuages légers en forme d’arbre, qui promet la poursuite du beau temps.

Dans l’Est, en Bourgogne et dans les Ardennes, on nomme ces grandes ramures célestes l’Arbre des Macchabées ou Poéri Machabé, ou encore Poirier des Macchabées en pays messin.

Dans les Vosges, les montagnards évoquent le méquébé, un nuage semblable à une gigantesque branche de fougère.

En Anjou, les gros nuages aux formes de chêne sont appelés le Chêne de Montsabran et annoncent tempêtes et orages. À l’inverse, le Chêne marin, version renversée, présage le beau temps.

Dans plusieurs régions, les nuages sont associés à des structures défensives :
Autour de Valenciennes, les nuages annonciateurs d’orages s’appellent les Fleurs d’oradge. Sur l’île de Sein, un nuage blanc immobile, visible au-dessus de la baie des Trépassés, est nommé Boquet Yan gô ou Bouquet de Jean le Vieux. Sur les côtes de la Manche, les marins appellent Châteaux les gros nuages noirs menaçants. En Provence, ces nuages prennent les noms de défenses (emparo), remparts (bérri), tourelles (tourello), donjons (tourrougat) et enfin châteaux (castèu) lorsque le ciel éclate en orages.

Dans le Lauragais (Haute-Garonne), les cumulus massifs sont appelés Rocs. On distingue :

  • Le Roc de Saint-Estapi (référence à Dourgne dans le Tarn),
  • Le Roc de Saint-Ferréol ou Barboblanc (barbe blanche),
  • Le Roc de Fouis (Foix),
  • Le Roc del Canigou, rattaché au célèbre massif pyrénéen.

Sur la côte de Tréguier, par beau temps, on observe des nuages nommés Berniotrez ou « tas de sable ».
En Anjou, les énormes nuages noirs porteurs de grêle au printemps sont surnommés la Nuée de Navarre, une appellation peut-être liée aux souvenirs des incursions navarraises au Moyen Âge. Les pêcheurs de la Manche disent parfois que « les poissons déménagent » lorsque les nuages couvrent le ciel : une façon imagée d’annoncer un changement brutal de temps.

Les cirrus sont fréquemment associés à des troupeaux de moutons. Les marins de la Manche disent que « les moutons montent en bergerie » quand ils voient ces nuages s’élever. Les nuages en forme de plumes qui annoncent le vent sont appelés Barbes de chat.
À l’île de Batz, les nuages jaune-rouge en cercle qui présagent le mauvais temps sont appelés Lagadou touill, ou yeux de roussettes (chiens de mer).

En Lauragais, les cirrus évoquent des plumes d’oiseaux ou des toiles d’araignée. En Provence, de petites nuées blanches sont appelées li Telo d’iragno (les toiles d’araignée) et lorsque le mistral souffle, ce sont les li Balo de lano (les pelotes de laine) qui semblent courir dans le ciel. Ce dernier nom est aussi employé en Haute-Bretagne.

En Provence, plusieurs nuages étranges et menaçants sont personnifiés, surtout ceux qui annoncent le mauvais temps :
La Lavandière (la Bugadiero) : Ce nuage se manifeste autour du Mont Ventoux. On l’imagine accroupi au sommet, en train de tordre une immense lessive de pluie qui se déverse en averses torrentielles. Une image à la fois poétique et terrifiante.
L’Accablé (Matablat) : Nuage craint par les moissonneurs, il symbolise la fin du beau temps et la menace de l’orage.
Galagu : Traduction littérale : le goulu, le goinfre. Dans la mythologie provençale, Galagu est une sorte de Gargantua céleste capable d’enjamber le Rhône et d’y boire en puisant l’eau avec ses mains. On a donné ce nom à des nuages gigantesques à l’apparence fantastique.

Dans le Lauragais, certains cumulus sont surnommés avec humour :
Vudo-coujos (« vide-citrouilles »),
Jardinié : des noms probablement liés aux dégâts que ces nuages causent aux cultures.
Dans le Poitou, une croyance populaire veut que les nuages « vont chercher l’eau à la mer avec des gamelles », une manière imagée d’expliquer la formation des pluies.

Sur la côte de la Hague, on montre aux enfants les bouenhoumards — des bonshommes formés par les cumulus qui, dans l’imaginaire local, amassent la pluie pour mieux la verser sur la terre.
En Vendée, c’est la Bête faramine qui fait office d’épouvantail : les parents désignent aux enfants les formes tourmentées des nuages d’orage comme étant la tête ou le corps de ce monstre venu punir les petits qui ne sont pas sages.
Enfin, dans le Hainaut, un proverbe illustre cette personnification des cieux menaçants :

« Temps couvert, Diable en l’air. »

Quand le ciel s’assombrit, c’est comme si le diable lui-même prenait possession des nuages.

Dans plusieurs récits populaires, les nuages sont assimilés à des entités malveillantes qui déclenchent tempêtes et orages. Mais les héros trouvent souvent des moyens de s’en débarrasser.
Dans une légende basque, Mahistruba, pris au cœur d’une terrible tempête, voit surgir un grand oiseau noir dans le ciel. Il fait appel au meilleur tireur de son équipage, qui abat l’oiseau d’un coup de feu. À cet instant, la tempête cesse. L’oiseau, sans doute lié aux nuages menaçants, incarne le mal qu’il faut vaincre pour retrouver le calme. Une autre version rapporte que des marins visaient même une nuée gigantesque traversant le ciel pour tenter de stopper le mauvais temps.
Plus tard, dans des récits plus modernes, certains marins prenaient des mesures originales pour éloigner les orages. Un capitaine soufflait dans sa trompe pour chasser les gros nuages noirs appelés « les Châteaux ». D’autres allaient jusqu’à tirer sur ces nuages d’orage comme s’ils étaient des ennemis visibles.

Les trouées de bleu dans un ciel gris ont aussi donné naissance à des dictons pleins de poésie ou d’humour populaire :
En Wallonie, après un orage, on guette le retour du beau temps avec cette charmante expression :

« Dès qu’on aperçoit assez de bleu pour faire un manteau à la Sainte Vierge et des bas à l’Enfant Jésus, l’orage est passé. »

En Bretagne, la vision est plus terre-à-terre :

« Le bleu doit être grand comme la culotte d’un gendarme »
ou, sur le littoral :
« … comme celle d’un douanier. »
Ici, l’apparition d’une petite portion de ciel clair suffit à rassurer : le pire est passé.

En Basse-Bretagne, une vieille croyance raconte que l’on peut voir apparaître dans les nuages les ombres des défunts. Le célèbre chercheur Jacques Boucher de Perthes mentionnait ce phénomène au début du XIXe siècle. En 1823, lors du décès de l’évêque de Quimper, les paysans des Monts d’Arrée affirmèrent l’avoir vu errer plusieurs jours durant parmi les nuées. Rassemblés par petits groupes, ils scrutaient le ciel, poussant des cris à chaque vision supposée du défunt.

Toujours en Bretagne, une légende tenace entoure la grande procession de Locronan. Lorsque le mauvais temps empêche le cortège sacré de sortir, des cloches mystérieuses se mettent à sonner dans le ciel et un cortège spectral se dessine sur les nuages. Ce sont les âmes des morts qui poursuivent malgré tout la cérémonie, menées par saint Ronan en personne, reconnaissable à sa clochette de fer.

Dans le Bocage normand, une ancienne croyance annonce que, à la veille de grands bouleversements sociaux, on peut voir dans le ciel des cavaliers fantomatiques chevaucher des montures aux crinières échevelées et livrer de furieux combats au-dessus des nuages sanglants ou livides. On raconte que les révolutions de 1789, 1830, 1848, ainsi que les grandes guerres, furent précédées de telles visions terrifiantes.

Au pays de Rocroi (Ardennes), chaque 20 mai, date anniversaire de la célèbre bataille entre Français et Espagnols en 1643, une étrange vision hanterait encore les lieux. À l’aube, en se plaçant à l’ouest du champ de bataille, on pourrait apercevoir les ombres des deux armées émerger lentement du sol et s’élever dans le ciel. Là-haut, elles se livrent à un combat spectral, se mêlent dans une effroyable mêlée avant de s’évanouir en brume au-dessus de la plaine.

Même au XXe siècle, ces croyances ont perduré. Peu avant la mort du pape Léon XIII, des paysans près de Rennes aperçurent un ballon traversant le ciel. Convaincus qu’il s’agissait d’un signe surnaturel, ils accoururent au château voisin en criant :

« Venez bien vite voir, le pape est mort ; il y a un grand signe dans le ciel ! »

Dans cette région, on dit que le pape ne peut entrer au paradis qu’après avoir survolé tous les pays catholiques sous forme d’esprit.

Dans un ancien conte de Basse-Normandie, une portion du ciel — probablement un nuage — devait s’abaisser sur l’élu que Jésus choisirait pour gouverner son Église en tant que pape. Cette vision céleste, à la fois simple et majestueuse, évoque la bénédiction divine descendue des hauteurs pour désigner un guide spirituel.

En Bretagne, un conte raconte l’histoire d’un magicien descendant d’un nuage en forme de croissant pour enlever une jeune fille. Cette apparition fantastique illustre la façon dont le ciel pouvait être perçu comme un royaume d’où surgissent des êtres surnaturels, capables d’interagir directement avec le monde des humains.

Les invocations aux nuages sont extrêmement rares dans le folklore français. Paul Sébillot n’en rapporte qu’un seul exemple, issu de la Vallée d’Aoste, où l’on parle un dialecte français. Cette formule ancestrale s’adresse directement au nuage pour appeler le retour du beau temps :

Nebbia, nebbia, va per haout
Pria lo bon Dieu qué foatsa tschaout.

« Nuage, nuage, élève-toi bien haut,
Prie le bon Dieu qu’il fasse chaud. »

Cette courte prière, simple et poétique, témoigne d’un lien intime entre les habitants des montagnes et les forces célestes, sollicitées pour dissiper les brumes et ramener la chaleur.