À travers toute la France, les traditions populaires parlent de cercles étranges apparus dans les prés, les landes et les clairières. Ces espaces circulaires, parfois verdoyants, parfois stériles, sont attribués aux danses nocturnes des fées, sorcières, lutins ou même aux pas du diable. Sous la clarté de la lune ou à l’aube, ces créatures formaient des rondes magiques dont l’empreinte marquait la terre de façon indélébile. Ces « salles de bal » enchantées suscitent depuis des siècles fascination, crainte et récits fantastiques.
Selon les régions, la perception de ces cercles varie. Dans certaines campagnes, ils sont redoutés : en Lorraine, les paysans fuyaient ces traces de peur d’y croiser des êtres malfaisants ; en Bretagne, on craignait que les vaches broutant leur herbe ne tombent malades. Ailleurs, au contraire, ces ronds sont vus comme des lieux protecteurs : en Berry, par exemple, ils servaient de refuges inviolables contre les bêtes sauvages ou les attaques démoniaques. Quant aux cercles associés aux sabbats de sorcières, ils renforçaient l’image inquiétante de danses diaboliques où l’herbe brûlait sous les pas.
Mais il existe aussi une facette plus positive de ces traces circulaires. Dans certaines régions comme la Côte-d’Or, la Gascogne ou le Pas-de-Calais, les cercles des fées sont réputés pour leur fertilité exceptionnelle : une herbe plus verte, plus épaisse, parfois même fleurie, qui engraissait mieux le bétail. Qu’ils soient redoutés ou admirés, maudits ou bénis, ces cercles nourrissent un imaginaire collectif où la nature, marquée par l’invisible, garde la mémoire des danses surnaturelles.